Brumes de métal.

Je les vois s’enfonçant dans la brume, sur des antiques drakkars de métal. Ces guerriers d’un temps qui s’engouffre vers le néant. Un brouillard froid, bientôt, les effacera à jamais des mémoires. Il restera pour un temps, leur musique combattante, émoussée par les modes, érodées par le saphir des platines qui les ont creusés, comme les rides de leur peau tannée par le feu des lumières.

Le vent de sable des Arénas les pousse, vers les lointains inconnus. En s’éloignant d’estrans de gloires, la silhouette s’estompe de ces guerriers sauvages. Vêtus de cuir et de jean délavé, percés de toute part des coups reçus. Leurs cicatrices de trop d’abus et de coups du sort. Leurs chaînettes argentées luisent encore, pour un temps. Derniers scintillements de l’oubli.

Des hommes aux muscles tétanisés de faire rugir les guitares, d’assener des frappes brutales sur la peau tatouée de leur batterie.

Sur leurs esquifs de guerre et de rage, rongés par le temps, ils se tiennent tous sur le pont, même les spectres, droits, fiers et mélancoliques. Leurs longues chevelures blanchies défaites par la bise, comme la crinière de chevaux-vapeur d’alcool et d’opium.

Des musiciens héroïques, dont la race et la langue n’ont plus leur place en ce monde, et qu’inéluctablement doivent se laisser dériver vers les soubresauts de la fatalité.

Quelques riffs rebondissent une dernière fois sur les étocs de hard-rock qui affleurent encore.

Ne survivra qu’un souvenir vaporeux d’acier, que personne ne saura distinguer dans les reflets métalliques des brumes de mer.

Je reste échoué sur le rivage de ma propre histoire, incapable d’agir. Le sable sous mes pieds se fait plus mou, et je sens bien que moi aussi, la terre m’aspire.

A jamais.

I can see them sinking into the mist on ancient metal longships. These warriors of a time hurtling towards nothingness. A cold fog will soon erase them forever from memory. For a time, their fighting music will remain, blunted by fashions, eroded by the sapphire of the turntables that carved them, like the wrinkles on their skin tanned by the fire of lights.

The sandy wind of the Arenas pushes them towards distant unknowns. As they move away from the shores of glory, the silhouettes of these savage warriors fade. Clad in leather and faded jeans, pierced on all sides by the blows they’ve received. Their scars from too many abuses and blows of fate. Their silver chains still gleam, for a time. Last flickers of oblivion.

Men with muscles tetanized to roar guitars, to strike brutal blows on the tattooed skin of their drums.

On their skiffs of war and rage, gnawed by time, they all stand on deck, even the spectres, upright, proud and melancholy. Their long, bleached hair untangled by the breeze, like the mane of horses-steamed by alcohol and opium.

Heroic musicians, whose race and language no longer have a place in this world, and who must inevitably let themselves drift towards the jolts of fatality.

A few riffs bounce one last time off the hard-rock bumps that still linger.

All that will survive is a vaporous memory of steel, which no one will be able to distinguish in the metallic reflections of the sea mists.

I remain stranded on the shore of my own history, unable to act. The sand beneath my feet grows softer, and I can feel that the earth is sucking me in too.

Forever.

Musique : Great White. House of broken love.

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